Maurice Blanchot et la poésie
Jacques Dupin
Editions P.O.L
Extrait tiré de : Jacques Dupin, M’introduire dans ton histoire, Paris: P.O.L, 2007, p. 123/127.
Le souci premier de Maurice Blanchot n’est pas la poésie. On peut dire cela. Même s’il a écrit de nombreux essais, admirables, sur les œuvres de poètes qui comptent. Mais plus largement la question de la poésie est partie essentielle de sa réflexion sur la parole et sur l’écriture. (…)
L’expérience de Maurice Blanchot rejoint, ou précède, assure et confirme, éclaire de sa lucidité, de sa vigilance, le vrai travail profond sur la langue auquel le poète, à ses risques et périls, ne peut à aucun moment se soustraire.
Une mise à nu de la langue, une exécration de la rhétorique et de la poétique, une décapitation du roi, un rappel des dieux morts et de leur retour impossible, cependant semeur de cailloux.
Baudelaire disait que la poésie mène à la critique. Ce livre en est une vérification, une de plus. Jacques Dupin y réunit des textes qu’il a écrits sur d’autres écrivains, des poètes principalement. L’originalité de l’ensemble est qu’il fonctionne aussi comme un recueil de poèmes et, de fait, ces textes qui sont indéniablement des textes critiques sont aussi des poèmes. Comme si seule la poésie pouvait parler de la poésie, rendre présent son mystère sans pour autant essayer, vainement, de l’épuiser, sans l’enfouir sous une rhétorique universitaire inopérante.
Une autre caractéristique de ce livre est que si on y rencontre des auteurs et des œuvres connus et célèbres (Blanchot, Ponge, Char, Jaccottet, Celan, du Bouchet, etc.) on y découvre aussi la curiosité constante et le goût de Jacques Dupin pour les écritures les plus risquées.