Espace Maurice Blanchot

www.blanchot.fr

Articles

À plusieurs titres | Christophe Bident

Mort en 2003, Maurice Blanchot a laissé une œuvre composée de treize romans et récits, vingt essais critiques et philosophiques, plusieurs opuscules à résonance autobiographique et politique. Il avait également publié des centaines d’articles littéraires et politiques qu’il n’avait pas rassemblés de son vivant dans des recueils ; plusieurs volumes ont paru ces vingt dernières années. Reste la question des archives. Si quelques échanges épistolaires ont été rendus publics, l’ensemble de la correspondance reste aujourd’hui secret. Il ne semble pas y avoir à proprement parler d’inédits, même si l’écrivain avait élaboré des travaux dont on ne sait quelle était la destination ; c’est ainsi qu’a pu paraître, en 2019, Traduire Kafka, un ensemble de traductions du Journal et de la correspondance de Kafka. Enfin, il y a les manuscrits et tapuscrits, dont la plupart permettent de mesurer l’évolution d’un texte et d’en analyser, à deux ou plusieurs stades, les variations. Enfin ? Non, car il est encore un cas très spécial, celui du premier roman et de ses versions successives.

Lire la suite sur Fabula

« Le Mythe d’Ulysse » de Maurice Blanchot | Philippe Lynes

Pour accompagner la publication ce mois-ci chez Kimé de Premiers récits : Le Mythe d’Ulysse, inédit suivi de L’Idylle (1936) et du Dernier mot (1935), édition établie par Leslie Hill et Philippe Lynes, nous publions ici un texte de ce dernier, chercheur à l’université de Durham en Angleterre. Il y retrace la généalogie du motif odysséen, au croisement entre littérature et philosophie, dans l’œuvre de Blanchot, et il présente des aperçus neufs sur ses rapports avec certains textes de Giraudoux, de Claudel et de Giono.

Ph_Lynes_Mythe_Ulysse_espace_blanchot

In Memoriam Maurice Blanchot

Louise Labé fut oubliée pendant des siècles. Certains gouvernements interdisent la lecture de Salman Rushdie. Le Prix Nobel a récompensé Annie Ernaux mais oublié Virginia Woolf ou René Char. À quoi tient la notoriété des œuvres ? À leurs qualités intrinsèques, à leur impact réel, potentiel ou secret, mais pas seulement. Les circonstances qui en encadrent l’accès sont nombreuses.

Le 20 février 2003, il y a 20 ans jour pour jour, disparaissait Maurice Blanchot. Cette mort survenait quelques jours avant l’ouverture du premier colloque qui lui fut consacré en France. L’œuvre de Blanchot était alors, depuis une trentaine d’années, largement commentée. Peut-être, ces derniers temps, l’intensité critique est-elle un peu retombée. Il ne faut pas s’en inquiéter. L’œuvre demeure. Elle appelle et appellera encore de nouveaux lecteurs. Avec Thomas le solitaire, Leslie Hill et Philippe Lynes nous ont récemment offert une version initiale intégrale de Thomas l’obscur. Les traductions se multiplient. Un colloque aura bientôt lieu au Japon. In memoriam Maurice Blanchot.

À moindres frais : réponse à une polémique de Michel Surya | Leslie Hill

Il y a un peu plus d’un mois, un ami vient de me l’apprendre, est sorti chez Hermann, dans la collection Le Bel Aujourd’hui dirigée par Danielle Cohen-Levinas, un nouvel opuscule signé Michel Surya, qui reprend quelques pages parues d’abord dans la traduction allemande de son livre polémique de 2015, L’Autre Blanchot, et publiées en mai 2020 dans la revue LignesL’Autre Blanchot (suite et fin), y proclamait l’auteur —, assorties de deux lettres de Jean-Luc Nancy, du 29 octobre 2019 et du 9 janvier 2020, dont la seconde comporte un post-scriptum (décembre 2020) sur lequel je reviendrai. Dans ce supplément de son travail de 2015, comme l’indique son titre (À plus forte raison: Maurice Blanchot, 1940-1944), Surya entend jeter un jour nouveau sur les activités politiques de Blanchot sous l’Occupation, notamment sa collaboration au Journal des Débats entre 1941 et 1944 et l’épisode de la mise en joue de l’été 1944 dont L’Instant de ma mort raconte les grands traits. Du nouveau, pourtant, dans la prose inutilement alambiquée de Michel Surya, on peine à le trouver. Déjà dans L’Autre Blanchot, comme j’ai pu le démontrer (dans Nancy, Blanchot: A Serious Controversy, ouvrage paru en anglais en 2018, et Blanchot politique : sur une réflexion jamais interrompue, livre publié en français aux éditions Furor en 2020), Surya procédait par citations trafiquées, lectures hâtives, interprétations tendancieuses, phrases arrachées à leur contexte, et amalgames peu crédibles, pour soutenir qu’avant-guerre Blanchot journaliste aurait été proche d’un certain fascisme ouvertement antisémite. Intervention d’une singulière mauvaise foi et dénuée de preuves historiques fiables, et dont la seule raison d’être, en faisant croire à son autorité pourtant nulle en la matière, est de mettre en valeur le nom même de Michel Surya.

Read More …

Timing Blanchot

Le 2 novembre 2018, à la Maison Française de New York University (NYU), s’est tenu un colloque intitulé « Timing Blanchot ». 

Zakir Paul et Denis Hollier, les organisateurs, ont ouvert la journée en évoquant le Blanchot des années trente et quarante. Dans la continuité du travail extrêmement juste et informé qu’il mène depuis plusieurs années, Zakir Paul, traducteur en anglais des Écrits politiques, a évoqué un Blanchot « préoccupé » par les questions de terreur et de non-violence et par le déclin spirituel de la nation française. Il s’est appuyé notamment sur ce texte étrange qu’est l’article sur Mahatma Gandhi. Sa critique fort juste des derniers opus de Surya et Nancy montre que ces derniers, comme d’autres auparavant, cherchent surtout à lire Blanchot avec leurs propres « préoccupations ». Denis Hollier s’est intéressé de très près aux Chroniques littéraires du Journal des débats. Sa lecture d’un article comme « Le silence des écrivains », où Blanchot prend en compte la difficulté d’écrire en temps de guerre et d’occupation, et tente paradoxalement d’interroger les livres qui n’ont pas paru plutôt que ceux qui ont été publiés, lui a permis de mettre en perspective d’autres chroniques, consacrées à quelques écrivains régionalistes et réalistes, et d’affirmer notamment que toute cette activité critique a pour objectif de préparer la réception de romans comme Thomas l’obscur et Aminadab. Car pour Blanchot alors, comme le formule joliment Denis Hollier, la littérature de la défaite est une défaite de la littérature.

Read More …

N’en déplaise | Michael Holland | À propos de Lignes, n°43

« N’en déplaise. (Pour une pensée conséquente) »
Michael Holland
A propos de Lignes, n°43, mars 2014, « Les Politiques de Maurice Blanchot 1930-1993 », 240 pages :

[…] Quand on se retourne vers l’utilisation qui est faite du terme fascisme dans ces analyses, le basculement dans la morale est encore plus abrupt. M. Surya ne s’y attarde pas longtemps, étant plus intéressé, on l’a vu, par l’équivalence qu’il perçoit entre l’adhésion de Heidegger au national-socialisme et celle de Blanchot à ce qu’il dénomme « le nationalisme fascisant français » (p. 21). Et en conclusion de son étude il se sert d’une autre équivalence pour reléguer la question du fascisme au second plan : « Si on se demande en effet en quel sens et combien Blanchot fut ou ne fut pas fasciste, ce qu’il ne prétendit d’ailleurs pas, dans les années 1930, on ne se demande pas encore assez en quel sens et combien il fut ou ne fut pas communiste » (p. 60). Ainsi, s’il peut dénicher « une phrase […] incontestablement fasciste » (p. 38) dans un des textes de L’Insurgé, il affirme que « la question de savoir si Blanchot fut ou non “fasciste”, ou s’il fut  “seulement” d’extrême-droite semble du coup superflue » (p. 38).

Read More …

Giuseppe Zuccarino, Il farsi della scrittura

Giuseppe Zuccarino, Il farsi della scrittura, Milano, Mimesis, 2012 (147 pp.)

Le dernier livre de Giuseppe Zuccarino – critique et traducteur italien de Mallarmé, Bataille, Klossowski, Blanchot, Caillois et Barthes – réunit une série d’études sur différents auteurs qui, d’une manière ou d’une autre, ont questionné le travail de l’écriture, en cherchant dans leur œuvre le parcours vers l’œuvre, mouvement qui en elle tend à l’accomplissement – ou qui la voue à l’inaccomplissement. Au-delà de la précision et la profondeur de ses analyses, il y a dans le chemin proposé par Zuccarino le charme d’un questionnement implicite que la juxtaposition des textes proposés est capable de révéler. Toutes ces études (déjà parues ailleurs) dessinent un parcours fascinant à travers la deuxième moitié du siècle passé ; elles sont recueillies avec l’intention – comme en témoigne le titre même du livre – de s’interroger sur le « se faire de l’écriture », il farsi della scrittura. C’est l’excellence même de l’écriture française du XXe siècle – Maurice Blanchot, Roland Barthes, Claude Simon, Pascal Quignard, Jacques Derrida – qui est appelée à témoigner de cette dimension matérielle, concrète – physique, physiologique, parfois physiopathologique – de l’écriture en œuvre, de l’œuvre se faisant et interrogeant son faire.

Read More …

Pour Monique | Danielle Cohen-Levinas

Comment ne pas trembler aujourd’hui devant toi ? Blanchot disait que ce qui surgit de la mort n’est pas le silence, mais « un murmure incessant », une « parole errante » à laquelle l’amitié donne une voix singulière, par-delà ce qui s’en va, par-delà ce qui nous reste…

Pour Monique
Danielle Cohen-Levinas
Texte prononcé à l’enterrement de Monique Antelme, au cimetière du Montparnasse, mercredi 3 octobre 2012

Read More …