Rencontre internationale Maurice Blanchot Un changement radical d’époque : pour une critique de la notion de “totalité” 8 mai 2025 – Faculté des Lettres de l’Université de Porto
Le Cycle de Rencontres Internationales Maurice Blanchot constitue une série de rencontres scientifiques permanentes consacrées aux études blanchotiennes, organisées dans le cadre de l’Institut de Philosophie de l’Université de Porto | Groupe de Recherche Esthétique, Politique et Connaissance, sous la coordination scientifique et l’organisation d’Eugénia Vilela (FLUP | UP | APK – IF) et d’Erika Rodrigues (UP | APK -IF), en collaboration avec Alain Milon (Université Paris Nanterre) et l’Espace Maurice Blanchot – dirigé par Christophe Bident (Université de Picardie Jules Verne), Jérémie Majorel (Université Paris Nanterre), Parham Shahrjerdi (Forums du Champ lacanien). La Rencontre Internationale Maurice Blanchot | 2025, intitulée Un changement radical d’époque : pour une critique de la notion de « totalité » présente une question philosophique qui se déploie de différentes manières dans l’œuvre de Maurice Blanchot : la problématisation des projets hégémoniques de construction de l’idée de « totalité ». En ce sens, on analysera la multiplicité des plans notionnels qui traversent l’idée de « totalité », en considérant l’affirmation d’une dimension absolue et infinie d’engendrement. Nous essayerons, ainsi, de penser les forces qui interrompent violemment les présupposés conceptuels impliqués dans les tentatives d’instauration d’une pensée totalitaire, produisant « un changement radical d’époque ». La Rencontre Internationale Maurice Blanchot | 2025 aura lieu à la Faculté des Lettres de l’Université de Porto, le 8 mai 2025, dans le cadre du Groupe de Recherche Esthétique, Politique et Connaissance de l’Institut de Philosophie de l’Université de Porto.
Entre le 1er et le 4 septembre 2025, l’Université Fédérale du Paraná (UFPR) accueillera la deuxième édition du Colloque Maurice Blanchot, cette fois dans un format hybride et international. Le colloque, qui réunira des professeurs, des chercheurs et des étudiants brésiliens et étrangers, a pour objectif de stimuler les débats et les recherches qui éclairent les questions philosophiques, littéraires et politiques de la pensée de Maurice Blanchot. À cette fin, le comité d’organisation propose un ensemble de conférences et une série de communications dans le but de promouvoir le dialogue entre chercheurs de différents pays et de différentes langues, ainsi que de renforcer les échanges philosophiques, littéraires et culturels autour de l’œuvre de Blanchot.
« Le dernier moment… C’est long, mais ce sera bon ». Le principe générateur d’Aminadab.
Si seule la honte de Joseph K. déborde les confins du Procès, survivant au personnage dont la mort clôt le livre de Kafka, c’est le personnage même de Thomas, ou ce à quoi il sert de véhicule, que le roman qui porte son nom échoue à contenir, et qui trouve dans la honte comme un nouveau départ. Aminadab, c’est le roman de ce débordement du roman. Parti pour compléter la tâche que Thomas l’obscur laisse inachevée et qui est, d’après Blanchot, d’« en finir », le roman est réduit à raconter ce qui dans tout acte de raconter empêche qu’on ne prononce jamais le mot de la fin. Roman donc d’une liminalité interminable, engendrant fatalement une quantité inépuisable de narration, qui apporte, avec une sorte de complaisance, sa charge de faits, de personnages, de sentiments et de réflexions. Si entre la version manuscrite et le roman publié en 1942 on peut dire qu’Aminadab subit une véritable cure d’amaigrissement, c’est que le travail du romancier à ce stade de son évolution consiste à tenir tête aux délectations d’une affabulation intarissable, en ramenant la narration perpétuellement au point où, perpétuellement, la fin lui échappe. Quelques moments de ce travail feront le sujet de mon intervention.
Michael Holland a publié des études de l’œuvre de Blanchot en anglais et en français, dont certaines ont été traduites en allemand, espagnol et russe. Il a co-fondé et co-édité les Cahiers Maurice Blanchot (2011-2019). Il est l’auteur d’un Blanchot Reader (1995) et d’Avant dire (2015), un volume de ses essais sur Blanchot en français. Il a publié une traduction en 4 volumes des Chroniques littéraires du Journal des Débats chez l’éditeur new-yorkais Fordham (2014-2019). Il prépare avec Hannes Opelz un Dictionnaire Maurice Blanchot pour les éditions Classiques Garnier.
Clément Willer
Des portes vers « autre chose » : quelques éléments pour une lecture croisée d’Aminadab de Maurice Blanchot et d’Abahn Sabana David de Marguerite Duras.
C’est une « porte bizarre » qui mène à la vérité, disait le peintre Francis Bacon. Aminadab de Maurice Blanchot et Abahn Sabana David de Marguerite Duras nous encouragent à franchir cette porte bizarre, ce seuil vers tout autre chose. Au début d’Aminadab, Thomas entrevoit un visage qui lui fait signe à travers la vitrine d’un magasin, ce qui l’amène à franchir la porte et à s’engouffrer dans une maison labyrinthique où il sera « un étranger » et ne retrouvera « rien de son ancienne vie ». Dans les premières pages d’Abahn Sabana David, une femme et un homme s’arrêtent en chemin pour contempler pareillement une intrigante maison : ils finissent par se diriger vers la porte et par pénétrer dans ce lieu où l’on devient « autre chose » que ce qu’on était. Marguerite Duras avait probablement lu Aminadab à sa parution chez Gallimard en 1942, et il est possible que le roman continuât de la hanter inconsciemment en 1970, tandis qu’elle écrivait Abahn Sabana David, qu’elle dédiait justement à son ami Maurice Blanchot. Faisant dialoguer ces deux romans, il s’agira de comprendre comment ils ébauchent chacun une hétérotopie, au sens où les hétérotopies ne renvoient pas comme les utopies à ce qui n’a aucun lieu, mais à des « espaces absolument autres » qui sont comme des failles dans la trame de l’ici et du maintenant : une hétérotopie écologiste dans le cas d’Aminadab, si l’on songe à la possibilité d’une « forme élevée d’union entre vous et le milieu où se façonne votre vie » évoquée à la fin du roman, et une hétérotopie communiste dans le cas d’Abahn Sabana David, si l’on songe au « communisme sauvage » rêvé par le groupe disparate de marxistes hérétiques. Dans les deux cas, sur un mode allégorique, « il s’agit d’aller », comme dirait Mark Fisher, « peut-être lentement, mais certainement de façon résolue, de là où nous sommes jusqu’à un endroit très différent ».
Clément Willer est docteur en littérature de l’Université du Québec à Montréal et de l’Université de Strasbourg. Sa thèse s’intitulait : Il faudra quand même essayer de ne pas le construire : le communisme sauvage de Marguerite Duras. Une version sous forme d’essai paraîtra chez Abrüpt en 2025.
Ryotaro Nakata
La texture invisible du texte : analyse des réécritures d’Aminadab.
On observe une myriade de différences entre Aminadab (1942) et sa version antérieure manuscrite. Dans ce dernier texte, jusqu’ici inédit, foisonnent des descriptions psychologiques plus développées des personnages ainsi que des précisions substantielles sur l’architecture énigmatique de la maison. Or, pour parachever son roman, Blanchot a soit entièrement supprimé ces éléments, soit les a réécrits dans une forme plus épurée et incisive. Cette démarche traduit sa volonté d’intensifier la densité de l’univers romanesque, d’en accentuer l’opacité et la structure labyrinthique.
Parmi les innombrables modifications, l’une des plus significatives pour le lecteur réside dans la transposition d’un passage, déplacé et inséré dans un tout autre contexte du roman. Il s’agit de l’entretien entre Thomas et Jérôme : il apparaît aux pages 142-144 de l’édition de la collection « L’Imaginaire », mais il appartenait originellement à une autre section du manuscrit. Cette redistribution textuelle renforce l’ambiguïté du monde romanesque et en accentue l’obscurité.
Dans cette intervention, nous nous attacherons dans un premier temps à analyser, d’un point de vue formel, la manière dont Blanchot réorganise ses manuscrits. Nous tenterons ensuite d’examiner les effets de cette recomposition sur la dynamique narrative et sur la logique interne de l’œuvre.
Ryotaro Nakata est doctorant à l’Université de Tokyo. Son dernier article, « La possibilité de l’art du roman : autour de Thomas l’Obscur de Maurice Blanchot », publié en japonais dans Études de langue et littérature françaises (n°126, 2025), explore une problématique de l’art du roman à travers une lecture de l’œuvre narrative de Blanchot.
Après quatre séances en 2024, le webinaire reprend avec deux séances au printemps et deux séances à l’automne.
La première séance aura lieu le 5 mai à 13h (heure française). Elle portera sur la récente édition, par Leslie Hill et Philippe Lynes, d’une version d’Aminadab antérieure à celle qui fut publiée en 1942.
La deuxième séance aura lieu le 10 juin à la même heure. Elle portera sur la correspondance politique de Blanchot dans les années cinquante et soixante.
La séance consacrée à « La philosophie en effet », initialement prévue au printemps, aura lieu à l’automne.
Mayara Dionizio publie « O escoamento da linguagem ou o vazio como condição de sentido » (« L’écoulement du langage, ou le vide comme condition du sens ») dans la revue d’esthétique en ligne Viso : Cadernos de estética aplicada (n°35, juillet-décembre 2024). Après une belle ouverture en forme de clin d’œil mythologique au tonneau des Danaïdes, Mayara Dionizio propose une réflexion sur l’altérité du langage fondée sur le vide comme condition de son existence. À partir de la lecture proposée par Blanchot dans « Le problème de Wittgenstein », qui établit un rapprochement entre Gustave Flaubert, Wittgenstein et Raymond Roussel, elle montre comment la structure du langage renvoie à un vide qui se réalise toujours dans la possibilité de dire quelque chose d’une autre manière.
Il y a quelques semaines, Stéphane Madaule, fils de Pierre, publiait Mais voici la Sibylle de son oncle Puységur (Les impliqués, 2024), où le personnage d’Edmond cherche des réponses supplémentaires aux mystères de la grande bibliothèque, dont les femmes font de la lecture… une tâche sérieuse. Mais voici que sort ces jours-ci un autre livre posthume, Ma Folie – Blanchot, de Pierre Madaule, qui tisse un récit de mémoire, de rencontre et d’échange avec Blanchot, composé de « quarante-six journées » de lecture, d’écriture et d’anamnèse, ainsi que d’annexes comprenant des lettres écrites par Madaule à un autre admirateur, Roger Laporte.
L’équipe de direction du site Espace Maurice Blanchot reconduit en 2025 le webinaire international inauguré l’an dernier.
Chacune des quatre séances de 2024 a rassemblé entre vingt et trente participants et ce sont 58 personnes, depuis plusieurs continents, qui ont participé l’an dernier à au moins l’une d’entre elles.
Les deux premières séances ont été consacrées au Blanchot politique de Leslie Hill et aux travaux actuels de trois doctorants. Les deux suivantes ont porté sur la traduction et la valeur d’usage de Blanchot. Une publication des Actes est à venir sur le site.
Les deux prochaines séances auront lieu au printemps et porteront, l’une sur les liens entre Blanchot et la collection « La philosophie en effet » des éditions Galilée, l’autre sur la récente édition, par Leslie Hill et Philippe Lynes, d’une version d’Aminadab antérieure à celle qui fut publiée en 1942.
La séance consacrée à Aminadab aura lieu le 5 mai 2025 à 13h.
La séance consacrée à « La philosophie en effet » aura lieu en mai ou juin, à une date restant à déterminer.
En 1973, Pierre Madaule publie chez Gallimard un des tout premiers livres portant sur l’œuvre de Blanchot : Une tâche sérieuse ? Madaule et Blanchot s’écrivaient alors depuis vingt ans et continueront à échanger ensuite. Après la mort de Blanchot, Madaule publiera cette correspondance (Gallimard, 2012).
Mais le livre de 1973 est aussi le début de ce qu’on pourrait nommer aujourd’hui une trilogie, composée par deux frères, Pierre et Edmond, l’aîné, qui use, lui, du pseudonyme de Puységur. Écrit en 1952-1953, publié en 1983 chez Flammarion, La Grande bibliothèque de Puységur est un récit présentant au lecteur une bibliothèque dont tous les livres sont incarnés par des figures féminines. Pierre Madaule poursuit ce travail avec Véronique et les Chastes (Ulysse fin de siècle, 1988), qui se déroule dans le même univers littéraire que La Grande bibliothèque.
Aujourd’hui, Stéphane Madaule, fils de Pierre, publie Mais voici la Sibylle de Puységur (Les impliqués, 2024), suite du récit de La Grande bibliothèque, où le personnage d’Edmond cherche des réponses supplémentaires aux mystères de la grande bibliothèque, dont les femmes font de la lecture… une tâche sérieuse.